Dans les traces des lecteurs
Initialement prévue le samedi, la balade de l’association Livres et Palabres a eu lieu dimanche après-midi. Covid oblige, pas question de se retrouver dans un lieu clos, ni trop nombreux, et c’est donc un livre à la main que les 7 participants se sont élancés sur le chemin enneigé de Sarenne. Il a beaucoup été question de rencontres : le roman graphique « À la vie », une petite pépite d’humanité de l’Homme Étoilé, l’infirmier aux plus de 1OO OOO abonnés sur Instagram, raconte la vie aux soins palliatifs avec douceur, pudeur, amour et humour ; le roman surprenant « Par les routes » de Sylvain Pruhomme suit la vie d’un autostoppeur qui ne peut s’empêcher de partir encore et encore et dessine atmosphères et sentiments en petites touches légères et fluides. Deux premiers romans : Laurent Petitmangin fait une entrée remarquable en littérature avec « Ce qu’il faut de nuit », un récit intime et social, beau et terrible, d’une écriture sobre et toujours juste. Anne Pauly dans son « Avant que j’oublie » décrit l’ambivalence de l’amour filial dans un texte aussi émouvant que cocasse et probablement autobiographique, démêle apparences et vérité, confronte passé et présent, pour enfin se réconcilier avec elle-même en acceptant la perte. Les lecteurs ont aussi présenté « La cantine de minuit », manga de Yarō Abe, « L’anomalie » d’Hervé Le Tellier, « Nature humaine » de Serge Joncour… Mais le soleil s’est voilé et la température a fraîchi, il est temps de rentrer, en se promettant de bientôt renouveler l’expérience.
Les livres présentés
" Ce qu’il faut de nuit " de Laurent Petitmangin
Manufacture de livre éditions (20 août 2020)
ISBN-10 : 2358876798
ISBN-13 : 978-2358876797
C'est l'histoire d'un père qui élève seul ses deux fils. Les années passent, et les enfants grandissent. Ils choisissent ce qui a de l'importance à leurs yeux, ceux qu'ils sont en train de devenir. Ils agissent comme des hommes. Et pourtant, ce ne sont encore que des gosses. C'est une histoire de famille et de convictions, de choix et de sentiments ébranlés, une plongée dans le coeur de trois hommes.
Avis du lecteur
Un premier roman, une pépite .
Decor : la Lorraine
Une relation père-fils, au pluriel.
La mère est morte, d’un cancer auquel elle s’est trop vite résignée, "la môman".Le père ’ veuf, élève seul ses deux garçons.
Cheminot et ancien militant socialiste, il découvre avec effroi que son aîné s’aventure dangereusement du côté de la droite extrême.
Paternité, transmission, solidarité, amitié, pudeur.
Un équilibre mouvant, un récit bouleversant.
"Avant que j’oublie" de
Anne Pauly
Éditions VERDIER (22 août 2019)
ISBN-10 : 237856029X
ISBN-13 : 978-2378560294
Il y a d'un côté le colosse unijambiste et alcoolique, et tout ce qui va avec : violence conjugale, comportement irrationnel, tragi-comédie du quotidien, un « gros déglingo », dit sa fille, un vrai punk avant l'heure. Il y a de l'autre le lecteur autodidacte de spiritualité orientale, à la sensibilité artistique empêchée, déposant chaque soir un tendre baiser sur le portrait pixellisé de feue son épouse ; mon père, dit sa fille, qu'elle seule semble voir sous les apparences du premier. Il y a enfin une maison, à Carrières-sous-Poissy et un monde anciennement rural et ouvrier. De cette maison, il va bien falloir faire quelque chose à la mort de ce père Janus, colosse fragile à double face. Capharnaüm invraisemblable, caverne d'Ali-Baba, la maison délabrée devient un réseau infini de signes et de souvenirs pour sa fille qui décide de trier méthodiquement ses affaires. Que disent d'un père ces recueils de haïkus, auxquels des feuilles d'érable ou de papier hygiénique font office de marque-page ? Même elle, sa fille, la narratrice, peine à déceler une cohérence dans ce chaos. Et puis, un jour, comme venue du passé, et parlant d'outre-tombe, une lettre arrive, qui dit toute la vérité sur ce père aimé auquel, malgré la distance sociale, sa fille ressemble tant.
Avis du lecteur
Un premier roman.
Janus dit-on avait deux visages, l’un tourné vers le passé, l’autre vers l’avenir.
Le père de ce roman, au physique avachi, buveur, brutal , quitte la vie sans laisser aux siens beaucoup de regrets. Le fils n’est pas prêt de l’acquitter. Sa fille , par l’entremise d’une lettre et de choses trouvées dans la maison délabrée , qu’il faut vider, découvre un père tout différent, sensible, poète , fragile et profond, à qui les mots ont tant manqué.
Un Janus peut -être pas si rare, réhabilité mais bien tardivement.