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6 décembre 2015

L'art en palabres de décembre : en deux mots, il faut se méfier des mots

Voici des petits riens qui font du bien,

des cocasseries, latinisme et mots inventés à savourer tranquillement…

En attendant notre triathlon des mots !

 

1 - Pour comprendre qu'en deux mots, ce n'est pas évident, un power point : cliquez sur le lien suivant  Les_cocasseries_de_la_langue_Francaise ou suivez les vignettes

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2 - Pour ne pas perdre son latin :


Un  professeur du lycée Janson de Sailly a répondu spirituellement aux contempteurs des études classiques. Voici  son discours prononcé à la distribution solennelle des  prix.

" Je regrette de ne pouvoir reprendre l’antique coutume de prononcer le discours en latin… mais, que voulez-vous, la mode est passée et il n’est personne, à l’heure actuelle, qui aurait le téméraire courage de le ressusciter.

  Primo, comme disait un latiniste de mes amis, cela pourrait passer pour un ultimatum  aux humanités modernes… et ce serait ipso facto un véritable outrage au statuquo que de faire ex cathedra un pareil lapsus.

 Secundo, il faut de plus en plus s’exprimer en français, c’est la condition sine qua non pour être persona grata.
 
 Tertio,  il ne faut pas ajourner sine die la remise de l’exeat* que vous attendez, soit dit en a parte, comme nec plus ultra.

Finis les pensums, finis les vetos  ;  l’heure est aux accessits,  aux ex æquo, et cætera. Dans un instant vous serez récompensés au prorata de vos efforts.
On proclamera orbi et urbi vos résultats, non point grosso modo, mais in extenso, et vous emporterez un palmarès que vous conserverez jalousement en duplicata,  comme memento,  première ébauche au sein de l’alma  mater** alias l’universalité de votre curriculum vitae.
Vous partirez ad libitum*** les  uns par l’omnibus, les autres pedibus cum jambis ou vice et versa.
Aussi ne veux-je plus retarder votre sortie d’un seul alinéa ou d’un seul post-scriptum et, parvenu à mon terminus,  je me contente de vous dire simplement, in extrémis :
mes chers amis, au revoir et belles vacances… "

 Quelques expressions latines dont le sens exact est parfois méconnu :
 *  exeat :  certificat de radiation, délivré par un collège ou un lycée, attestant que l’élève a quitté l’établissement et qu’il est en règle (dettes soldées, manuels restitués, etc.), quitus
** alma mater : à l’origine sainte mère. Aujourd’hui, essentiellement employé dans le monde de l’enseignement supérieur. Ainsi, dans les pays anglophones, le terme est surtout employé pour désigner l’université dans laquelle une personne a fait ses études, mais aussi pour désigner un collège ou un lycée.
*** ad libitum : caractère facultatif d’une partie vocale ou instrumentale ; liberté de mouvement laissée à l’exécutant dans un passage.

3 - Quand Lire vous propose un petit voyage, limité au XXe siècle, au pays des néologismes littéraires.

Abracadabrantesque! Lorsque le président de la République utilisa cet adjectif voilà quelques mois, certains crurent qu'il s'agissait d'un barbarisme - avant de s'apercevoir que Rimbaud en était le père, ce qui légitimait automatiquement son emploi. De fait, l'amour de la langue française conduit souvent les écrivains à lui faire de beaux enfants. Certains fondent des familles nombreuses, tels Céline, Boris Vian, Frédéric Dard, Jacques Audiberti ou Henri Michaux; d'autres ne violent le vocabulaire qu'avec parcimonie; mais rares sont ceux qui, un jour ou l'autre, n'ont pas cédé à la tentation d'ajouter un mot de leur cru au dictionnaire.

 

Agoraphilie. Nous connaissions l'agoraphobie. Dans L'exposition coloniale, prix Goncourt 1988, Erik Orsenna décrit son contraire, l'amour des places publiques, la passion des foules. 

Aimeuse. Aimée, aimable, amante, amoureuse ne lui suffisant pas, Colette leur adjoignit cet adjectif à sa façon. 

Allélouyer. Entonner des alléluias, selon Julien Green. 

Américanoïaques. Créateur très prolifique de néologismes, Serge Rezvani alla jusqu'à choisir un mot-valise pour intituler l'un de ses romans Les américanoïaques

Antimémoires. Titre illustre de l'autobiographie d'André Malraux. De mauvaises langues ont insinué qu'il convient fort bien à une ?uvre où la mémoire vacille, titube, et tombe souvent dans des trous... 

Bachon. Pour pouvoir parler sans être compris, Jean et Paul, les jumeaux des Météores de Michel Tournier, ont inventé une langue baptisée éolien. Le mot «bachon», par exemple, signifie «tout ce qui flotte (bateau, bâton, bouchon, bois, écume, etc.)». Ajoutons la curieuse «bassitude» (in Gaspard, Melchior et Balthazar) en référence à l'altitude négative de la mer Morte par rapport à la Méditerranée. Mais s'il est une trouvaille que revendique plus que tout Michel Tournier, c'est celle du mot «héliophanie» (voir Vendredi ou les limbes du Pacifique), aussi noble que le lent et majestueux lever du soleil qu'il définit, et homologué, qui plus est, par le Grand Robert. 

Badonguer. Se dit des cloches qui font ding dong! dans L'annonce faite à Marie de Paul Claudel. 

Buccalise. Sur le mode de vocalise. Dans Tohu-Bohu, Richard Jorif forge ce mot pour désigner les plaisirs de bouche auxquels se livrent les amoureux avant de passer à des actes encore plus prometteurs. Expert en trouvailles sémantiques, Jorif nous gratifie d'une jolie «tonitruance» dans le même Tohu-Bohu et son Navire Argo nous vaut une «gaminauderie» d'une grande fraîcheur. 

Cambronnade. Cet euphémisme érudit, forgé par Apollinaire, permet d'esquiver les fameuses cinq lettres que le père Ubu d'Alfred Jarry porta à six (Merdre!). Parmi les innombrables trouvailles du pauvre Guillaume, la plus prospère est sans conteste «surréalisme», mot inventé en 1917 et devenu depuis lors un véritable tic de langage. 

Carpasson. Entre carpette et paillasson. Yann Queffélec joue de cette contraction dans Le charme noir pour qualifier un mari ou une épouse sans réaction face aux brimades de son conjoint. 

Cataractant. Julien Gracq, pourtant très peu porté sur les néologismes, applique cet adjectif à une mer agitée. 

Centagénaire. On pourrait croire qu'Eugène Ionesco est guidé par un souci d'uniformité lorsqu'il modifie centenaire sur le modèle de quadragénaire. Mais dans ce cas, pourquoi transforme-t-il dans la même pièce octogénaire en octogénique? 

Chito ou Chitien. Une langue dans la langue, un français très peu conventionnel, celui que l'on parle dans Collège Vaserman de Michel Chaillou. 

Cosmopolisson. Qui pouvait réunir en un seul mot voyage et libertinage? Paul Morand, évidemment. 

Covivre. Les présidents de la République et les Premiers ministres français savent-ils qu'Henri Michaux a inventé un verbe pour décrire le supplice qu'ils s'infligent régulièrement depuis une quinzaine d'années? Du même, citons également «divinogène» (pour qualifier certains produits stupéfiants), «émiettofatras» et «presquevoix» (sorte de murmure). 

Crougnougnou. Ce terme concocté par Frédéric Dard désigne un élément très convoité de l'anatomie féminine. Notons au passage que son ?uvre contient les variantes crougnou, crougnozoff, crougnouter, crougnougnouter et crougnoter la case-trésor. Du bourg breton de Ratpalamarch' à l'adjectif embistrouillant (ennuyeux), du substantif marsupiastre (monnaie de Tasmanie valant 8 dollars) au franglais Saint-Cloud very moche, du verbe contre-mauvaisefortunebonc?urer à l'expression brandonner du calbar, son imagination carbure à jet continu. «J'ai fait ma carrière avec un vocabulaire de 300 mots, a-t-il un jour blabluté. Tous les autres, je les ai inventés.» C'est à peine exagéré. Le Dictionnaire San-Antonio qu'ont publié trois de ses meilleurs exégètes compte 15 000 entrées. Entre les noms communs et les noms propres, on trouve comme il se doit des pages roses: 140 pages consacrées non pas aux locutions latines, mais à l'argot kamasutrique... 

Culomane. Synonyme de «pygolâtre». La paternité de ces deux mots est attribuée à Roger Peyrefitte, grand amateur de derrières devant l'Eternel. Aucun rapport avec les serre-fessards vilipendés par son confrère Montherlant. 

Dormioter. Pour Jean Giono, synonyme de sommeiller ou somnoler. A noter également le très éloquent «léchicoter». 

Edgarpoétique. Ce superbe néologisme est l'?uvre d'un orfèvre en la matière, Jacques Audiberti. On lui doit également «délyrer» (croisement de délirer et de lyre qui s'applique à merveille à Edgar Poe), «fantascience» (genre fort prisé par Edgar Poe), «barbassu», «nauséabondance» ou encore «nirvanescent». 

Emperpignanné. A prononcer avec l'accent de Marcel Pagnol pour désigner celui qui voudrait quitter Perpignan, mais est obligé d'y rester. 

Empoiler. Au grand désespoir d'André Gide, ce verbe s'applique à tous les garçons vers l'âge de quinze ans: les gracieux éphèbes se métamorphosent en brutes velues. 

Ensuisser (s'). Se laisser gagner peu à peu par la sérénité helvétique. Marguerite Yourcenar, classique parmi les classiques, s'autorise également un latinisme qui pourrait presque être authentique: la «carnalité». 

Epistoleros. Ou les desperados de l'écriture. Premières lignes de Jean-Marie Laclavetine s'attaque à cette maladie que l'on appelle aussi graphomanie. Synonyme de «epistoleros»: «écriveurs». Quant à ceux qui se prennent pour le nombril du monde, ils sont atteints d' «autobiographite». Mais gare aux «éditueurs d'élite» qui les attendent au coin du bois de la littérature. 

Epoustraque. Dans Le Paradis désenchanté d'André Brincourt, c'est Adam qui se trouve époustouflé au jardin d'Eden. Ce texte mystico-biblique, beau délire écrit dans un maquis de la Résistance et gardé secret pendant cinquante-cinq ans, fourmille d'expressions aussi poétiques qu'étranges: que sont les «oulaguis», les «baflores», l' «aspir», les «algues amitieuses», l' «extrubante hébétude», voire l' «extrébante solitude»? Peu importe, «la musique joue à la place du sens», dit aujourd'hui André Brincourt. 

Escarpille. Chaussure féminine qui apparaît dans L'heure maliciôse de Louise de Vilmorin. 

Eviré. Expert en castration (Porporino), Dominique Fernandez désigne ainsi l'eunuque. Italianisant émérite, il puise dans la langue de Dante pour évoquer l'après-midi et le plaisir d'une «sieste poméridienne» (Dans la main de l'ange). 

Festivant. Espèce de vacancier, selon Blaise Cendrars. 

Fictionnaire. Publié en 1981, Le petit fictionnaire illustré d'Alain Finkielkraut rassemble une vaste collection de mots-valises, obtenus en soudant la tête d'un premier mot avec la queue d'un second. Fiction + dictionnaire = fictionnaire. 

Flûtiau bourru. Cet instrument de musique est sans doute l'une des plus célèbres trouvailles de Boris Vian, dont les romans sont d'incessantes créations verbales. Dans son univers, on s'ablute tous les matins dans la salle de bains; on danse le biglemoi au mois de juillembre; on boit du Reglingot 1934 et l'on mange du chocolat à la sapote; on vote les lois dans un députodrome; on succombe à une crise d'échancelle ou à un hipparion de l'ovaire. Les animaux familiers se nomment andouillon, bouzillon, écubier et coucou à gaufres; les botanistes notent la présence de morgline, de pruche, de cardavoine et de gratte-menu des Tropiques. La plupart de ses inventions n'ont jamais quitté le domaine littéraire, mais il en est une au moins qui est passée dans le langage commun: vers 1955, il donna le nom de «tube» à ce qu'on avait appelé successivement une ritournelle, une scie, puis un saucisson, autrement dit un succès musical. 

Franglais. Publié en 1964, Parlez-vous franglais? dénonçait l'abâtardissement du français. Si le cri d'alarme de René Etiemble n'a eu aucun effet, du moins a-t-il fait entrer un mot nouveau dans les dictionnaires. Il est aussi le père du verbe «sabirer» et de l'adjectif «foluptueuse», qui s'applique aux créatures pâmées jusqu'à l'excès. 

Gisouclot. Il n'y a pas d'explication à donner, de l'aveu même de René de Ceccaty, ravi seulement par la sonorité de ce mot derrière lequel se cache un fruit imaginaire. Tout aussi imaginaire, le «cliponshvat», animal proche du mulot d'après son créateur (dans Babel des mers). Et pourquoi s'assoit-on sur des «palondesses», plutôt que sur des tatamis, dans La sentinelle du rêve sur lequel souffle un vent d'orient? Allez savoir... 

Grincieux. Autrement dit à la fois grincheux et gracieux. Il s'agit d'un «râleur au doux visage», d'après Monsieur Tac qui donne son nom au titre du roman (1976) de Pascal Bruckner. Ce personnage fait d'étranges rencontres comme la «putrain» qui n'est autre, son nom l'indique, qu'une «prostituée en service officiel sur les chemins de fer», le «téléphant», qui désigne un pachyderme dressé pour servir le thé aux Indes mais aussi une cabine éléphant pour remonter les skieurs au sommet des pistes, ou le «dogteur», médecin déguisé en chien pour tromper ses patients. Monsieur Tac fréquente les «cafées», bistrots réservés aux fées et aux marraines (!), et se soulage dans les «étoilettes» où ne vont pourtant que les stars. 

Immondain. Ultra-snob selon Joseph Delteil, qui n'a cessé au cours de sa carrière d'embellir la langue française. Citons «amouracheries», «enképissé», «matamorer» ou encore «républiquette». 

Innommie. Dans Perasma (Seuil), le dernier roman de Pierre Mertens, il est question d'un pays qu'on ne peut nommer, un pays ambigu qui résiste à toutes les identités, la Belgique. Il y a quelques années, à l'occasion d'un dossier consacré à son pays dans Les Nouvelles Littéraires, l'auteur avait déjà inventé le mot «belgitude» en référence à la «négritude» de Senghor. Un suffixe qui lui tient à c?ur puisqu'on le retrouve dans «mornitude» (Le niveau de la mer). Toujours le plat pays... 

Joconder. Sourire avec un air idiot pour Henri Troyat, qui manque singulièrement de respect envers Léonard de Vinci. 

Malvie. Comme «malbouffe». Mais Tahar Ben Jelloun tient à l'antériorité de cette construction linguistique sur celle qui définit le combat de José Bové. Le Goncourt 1987 et le cinéaste Daniel Karlin en partagent la paternité à l'occasion du film La malvie qu'ils avaient coréalisé et que le romancier avait prolongé par un livre publié sous le même titre. 

Matrimoine. Dérivé de patrimoine, Le matrimoine est l'un des romans les plus connus d'Hervé Bazin. Celui-ci avait déjà eu recours au même procédé dans Vipère au poing: la «cleftomanie» (forme d'obsession parallèle à la cleptomanie ou kleptonanie) consiste à tout fermer à clef, puis à enfermer les clefs... 

Melhäel. Ne cherchez pas à vous reposer à l'ombre d'un de ces arbres magnifiques évoqués par Gérard de Cortanze dans Cyclone. Il n'en existe que virtuellement. Pour la petite histoire, sachez tout de même que le mot désignant cette espèce végétale imaginaire est construit à partir des prénoms des deux enfants du romancier, Mélanie et Raphaël. Du même auteur, retenons un «manicome» (lireLes vice-rois), mot dérivé de l'italien, synonyme d'asile. 

Mimosé. Nous devons ce bel adjectif, dérivé de mimosa, à Saint-John Perse. Il n'est hélas! pas passé de la poésie dans la langue courante. 

Misandre. De même qu'il existe des misogynes, il existe des «misandres». C'est le terme auquel s'est risquée Paule Constant dans sa thèse de doctorat intitulée Un monde à l'usage des demoiselles et saluée par l'Académie française. On lui doit dans La fille du Gobernator un «pataouasse» qui désigne un crapaud géant et dansWhite Spirit un «coup de toukouk», autrement dit un coup de bambou, emprunté, paraît-il, au dialecte familial de l'auteur. 

Moâ. Moâ, c'est moi à la puissance dix pour Sacha Guitry, dont l'ego n'était pas franchement atrophié... Il donna un pendant à cette innovation phonétique en faisant jouer en 1949 une pièce intituléeToâ. A rapprocher du moimoiïsme fustigé par Céline. 

Nombrelle. Au Paradis, le français prend d'étranges libertés. AuParadis de Sollers, bien sûr, Paradis I et Paradis II (1981-1986). Et donc, si l'homme a un nombr... il, pourquoi la femme n'aurait-elle pas une «nombrelle»? De même, pourquoi ne pas distinguer le bébé mâle de sa cons?ur, la «bébée»? Dans cet éden-là, les mots ont tendance à se déglinguer ou à dériver. L'histoire? Non, «l'hystoire» car l'histoire tient aussi de l'hystérie. Univer... sel? Et pourquoi pas, tant qu'on y est, «univerpoivre», «univermiel»? Aujourd'hui? Mais que dites-vous d' «aujournuit»? 

Nostalgérie. Joli mot-valise inspiré à Henry de Montherlant par le destin tragique des pieds-noirs. 

Paperole. Entre les trente-deux cahiers noirs recouverts de moleskine et la bouteille d'encre violette, les paperoles tiennent une place de choix dans la légende proustienne. Mais attention à ne pas les confondre avec les béquets, ces bandelettes de papier collées dans les cahiers une fois les marges surchargées de corrections. Sa gouvernante, Céleste Albaret, a défini le terme avec une grande précision: «Des notes venues de l'inspiration du moment et jetées sur des bouts de papier volants, ou parfois sur le dos d'une enveloppe ou même sur la couverture d'une revue.» Par ailleurs, si les néologismes ne fourmillent pas dans la Recherche, on peut tout de même signaler quelques verbes comme «condoléancer» ou «se racoquiner». 

Phallucination. Belle collision - ou collusion? - très sexuée de deux mots dont on ne sait lequel domine l'autre. Dans Le voyage à Naucratis, Jacques Almira décline avec aisance le sexe de ses émois et de ses délires: «sextravagant», «sexubérant», «sextraphysique», «sextraordinaire» ... 

Pleuviasse. La banlieue sous la pluie n'est déjà pas gaie. Mais lorsque Cavanna fait tomber «une vilaine pleuviasse morne» sur des «immeubles étiques», elle devient franchement sinistre. 

Pluricon. Champion toutes catégories du néologisme depuis Rabelais, Céline truffe sa prose de trouvailles inouïes. Elles naissent de sa verve, elles accompagnent son rythme, elles donnent à son style une couleur unique. Et leur signification n'exige pas de longs développements. Qu'on en juge: blablaveux, brouillamineux, croupignoteux, désastrogène, phrasuleux, écrivaineux, embérésiné, landruste, parlouille, scrifouilleux, trafalguerie, trouducteur. 

Ponukéléien. Qu'est-ce que le ponukéléien? Tout simplement la langue parlée dans l'empire du Ponukélé, longuement évoqué par Raymond Roussel dans ses Impressions d'Afrique

Postexotisme. Antoine Volodine n'a créé qu'un mot, celui-là, pour définir son style. 

Qeqette. Ce mot étrange bien que vaguement familier exige une brève explication. Après avoir achevé La disparition, roman de 312 pages dans lequel ne figure pas la lettre «e», Georges Perec entreprit le tour de force inverse. Le résultat, ce sont Les revenentes, roman pornographique qui ne tolère aucune voyelle à l'exception du «e». La langue française, bonne fille, lui fournit des mots tels que sexe, membre, fesses, lèvres ou levrette. Mais pour faire avancer son récit, il fut bien obligé de multiplier les acrobaties. D'où un certain nombre de vocables nouveaux à la limite de la tricherie: le Q, le glend, les testeeQles, bézer leebrement, enfeeler, bende d'enQlés, en sendweech, etc. Pour en revenir au mot sélectionné, il est nécessaire de citer cette phrase terrible: «Les qeqettes pendent treestement.» 

Rivaroliser. Pour Maurice Martin du Gard, cela consiste à parler un français d'un admirable classicisme. C'est donc l'exact contraire du verbe vachespagnoliser forgé par Cavanna. 

Scarabot. Croisement de scarabée et d'escarbot effectué sous la responsabilité de Francis Ponge. D'un point de vue entomologique, le mariage n'a rien de scandaleux, puisqu'un escarbot n'est rien d'autre qu'un coléoptère. 

Shaga. Le shaga, langue proche du cambodgien, est employé dans la pièce du même nom écrite par Marguerite Duras en 1968. Quelques exemples: «Hati na senang», «Hamba tiada», «Jaga pagi». Ou encore cette réplique inoubliable: «Oyi oyo». 

Tarand. Inépuisable créateur de mots, Antonin Artaud plonge souvent ses lecteurs dans la perplexité. Ici, il a la gentillesse de fournir lui-même la définition: «Et qu'est-ce que c'est que des tarands? Parfait, des tarands sont des animaux qui taraudent en tournant et en raclant, quelque chose comme des fourmiliers, des blaireaux...» 

Touchatouisme. Terme créé par Jean Cocteau, qui savait fort bien de quoi il parlait. 

Transilluminé. Superlatif fabriqué par Victor Segalen. Ce fin connaisseur de l'Asie a-t-il voulu battre à son propre jeu le Bouddha, qui s'en était tenu en son temps à une simple illumination? 

Trifurquer. Les sentiers se contentent de bifurquer chez Borges; ils trifurquent chez Aragon. Ce dernier qualifie aussi de «chauvissant» l'homme dont le front se dégarnit. 

Valabiliser. Grand amateur de cadavres exquis et autres bizarreries, André Breton s'est pourtant très peu livré au petit jeu des néologismes. Cet exemple malsonnant prouve qu'il a eu raison de s'abstenir. 

Wallettien. Savez-vous ce qu'est une conversation «wallettienne»? Dans La conférence de Cintegabelle, Lydie Salvayre a recours à cet adjectif incompréhensible pour quiconque ignore les qualités d'esprit de son compagnon, Bernard Wallet, directeur des éditions Verticales. 

Ziuthre. Jean-Paul Sartre, guère réputé pour ses fantaisies stylistiques, met ce mot dans la bouche d'un dément. Dans Le mur, le ziuthre est un talisman cartonné en forme d'araignée. 

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